Dossier du port de Québec : quels impacts pour le droit de l’environnement au Québec ?

Le 16 avril 2020, la Cour suprême a rejeté la demande d’autorisation d’appel de l’arrêt de la Cour d’appel dans le dossier du port du Québec, qui met en jeu l’application de plusieurs dispositions de la Loi sur la qualité de l’environnement (ci-après, la « LQE ») à une entreprise fédérale relevant des compétences du Parlement sur la navigation et les propriétés publiques fédérales.

Le dossier du port de Québec débute en 2006 et concerne un projet de construction de nouveaux réservoirs de stockage entrepris par la compagnie IMTT Québec inc., qui loue un emplacement de l’Administration portuaire de Québec sur des terres appartenant au gouvernement fédéral. Or, à cette occasion, IMTT choisit de procéder sans aucune autorisation provinciale, d’où le litige avec le gouvernement du Québec, qui demande notamment une injonction pour soumettre le projet à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement prévue à la LQE.

Contrairement au juge de première instance, la Cour d’appel conclut que les articles 22, 31.1 et 31.1.1 LQE, qui mettent en place les deux mécanismes d’autorisation environnementale au Québec, sont constitutionnellement inapplicables aux activités d’IMTT, car ces pouvoirs provinciaux entraveraient le contenu essentiel de la compétence fédérale sur le contrôle de l’aménagement, de l’usage et de la réglementation des propriétés publiques fédérales pour les fins d’y exercer une compétence fédérale, en l’occurrence celle sur la navigation.

En d’autres mots, la Cour d’appel vient écarter l’application du régime québécois d’évaluation environnementale aux projets entrepris sur une propriété publique fédérale qui relèvent d’une compétence fédérale. Pensons ici aux ports et aux aéroports internationaux.

Toutefois, elle maintient la constitutionnalité et donc l’application du régime normatif portant sur le contrôle et l’interdiction du rejet de contaminants dans l’environnement établi par l’article 20 LQE. Ainsi, le ministre de l’Environnement du Québec peut exiger les renseignements et effectuer les inspections nécessaires auprès des entreprises fédérales pour s’assurer du respect des normes adoptées en vertu de ce régime.

Ce faisant, la Cour d’appel crée néanmoins une rupture au sein de la LQE en isolant le volet préventif (art. 22, 31.1 et 31.1.1 LQE) du volet normatif et prohibitif (art. 20 LQE), ce qui aura sans doute un impact considérable sur la capacité du gouvernement du Québec à encadrer les entreprises fédérales œuvrant sur son territoire.

Reste la question de savoir si les conclusions de la Cour d’appel sur la constitutionnalité de la LQE s’appliqueront aux projets entrepris sur des terres privées par des entreprises qui relèvent d’une compétence fédérale (aérodromes, pipelines et gazoducs interprovinciaux, etc.).

À ce sujet, rappelons qu’en 2018 la Cour supérieure a déclaré que l’article 22 LQE était inapplicable aux activités ayant lieu sur le site de ce qui devait être le nouvel aérodrome de Mascouche. La Cour d’appel a refusé de se prononcer sur cette décision étant donné le caractère théorique du pourvoi. Le 16 avril dernier, la Cour suprême a également rejeté la demande d’autorisation d’appel du gouvernement du Québec à l’encontre de cet arrêt, ce qui a pour effet de confirmer le jugement de première instance.

Faut-il en conclure que le régime préventif de la LQE est désormais inapplicable à toute entreprise fédérale pour la seule raison qu’il requiert l’obtention d’une autorisation discrétionnaire ? Rien n’est moins certain !

Pour toute question relative au droit de l’environnement, n’hésitez pas à contacter un membre de l’équipe de Beauregard Avocats.